Depuis le premier janvier 1918, l’administration des douanes marocaines était passée des mains du contrôle de la dette aux mains du protectorat . Des dispositions réglementaires sous forme d’arrêtés viziriels avaient, depuis, assuré la suite et le bon fonctionnement de l’institution douanière. Cependant, il restait à fixer, vis-à-vis des tiers, des points d’ordre purement législatif et qui devaient constituer en fait, un code fiscal analogue au code français du 28 avril 1916. Ainsi, le dahir de 1918 sur les douanes portant le grand sceau du Sultan Moulay youssef fut-il une des lois fondamentales du droit douanier contemporain. Ce texte législatif conférait l’assise juridique à l’action douanière en précisant notamment :

1- Les droits et les obligations de l’administration des douanes et de ses agents, notamment les garanties légales protégeant les agents et les redevables, l’assermentation, le droit de verbalisation, le bénéfice des circonstances atténuantes et du sursis, la responsabilité civile de l’administration et des particuliers, etc… ;

2- la compétence des litiges, en matière civile, lorsque la juridiction française est compétente, le juge de paix est juge de droit commun, d’où facilité plus grande et solution plus rapide ;

3- la prescription tant en faveur des redevables que de l’administration (institution de courts délais en matière civile) ;

4- le privilège et préférence de l’administration sur les meubles et effets mobiliers des redevables et leurs cautions en deuxième rang après les créances de l’Etat pour les contributions de l’année courante ;

5- la contrainte par corps (en matière pénale seulement) ;

6- le droit de transaction accordé à l’administration pour le règlement amiable des contraventions.

Cette législation ne dérogeait à aucun des principes posés par le droit marocain et reproduit, en les adaptant aux conditions locales, les dispositions essentielles de la législation française. Elle fixait ainsi un nouveau cadre des droits et obligations de l’Administration des Douanes et de ses agents.

A l’instar de tous les fonctionnaires du makhzen agissant pour l’exécution des lois et des ordres de l’autorité publique, les agent des douanes ont été placé sous la sauvegarde spéciale de la loi.

Les rédacteurs de la nouvelle loi douanière n’avaient pas fait allusion à la procédure de prestation du serment pratiquée au Maroc depuis des siècles. Cette procédure traditionnelle aurait-elle été abandonnée ou simplement ignorée? En tout état de cause, depuis le 1er janvier 1918, les agents des douanes ne pouvaient entrer en exercice qu’après avoir prêté serment dans les formes prévues par le dahir du 1er mai 1914. Or, ce dernier texte n’était applicable que dans la zone française.

 



 

Une autre question se posait dès lors : le personnel douanier de la zone espagnole et de la zone internationale de Tanger prêtait-il serment selon la procédure traditionnelle ou bien selon les dispositions de la nouvelle législation sur le serment des agents verbalisateurs de l’État.

Pour exercer leur travail, les agents de douanes devaient également être porteur d’une commission d’emploi qu’ils étaient tenus d’exhiber à toute réquisition.

Un cadre actif a été également institué parmi l’ensemble du personnel douanier. Ainsi, les officiers, sous-officiers, préposés et matelots étaient considérés comme agents de la force publique. A ce titre, il obéissait aux réquisitions régulières des autorités civiles et militaires. Les procès-verbaux rapportés par les agents des douanes en matière fiscale devaient être établis par deux agents en moins. Il faisaient foi jusqu’à inscription de faux. Lorsque les mêmes procès-verbaux étaient dressés par des agents verbalisateurs étrangers à l’administration des douanes, il faisaient foi jusqu’à preuve du contraire.

Les droits et obligations de l’administration des douanes étaient également spécifiés dans la nouvelle loi. Elles concernaient la compétence territoriale, la prescription, les privilèges, la contrainte par corps et la transaction.

L’introduction des dispositions particulières du droit français concernant ces domaines a été l’un des premiers aspects de l’introduction de certains concepts du droit français dans les législations traditionnelles du Maroc.

Parallèlement aux dispositions de la loi organique sur les douanes d’autres mesures réglementaires ont été édictées, instaurent un nouveau régime de dédouanement des marchandises. Dans ce cadre, il y aurait lieu de noter :

- la faculté accordée aux déclarants de fournir eux même les formules de déclaration (arrêté viziriel du 22 juillet 1918) ;

- l’enlèvement des marchandises déclarées en douane (décision du 13 décembre 1918) ;

- le mode de répartition des amendes (arrêté viziriel du 16 décembre 1918);

- l’exercice du droit de transaction (arrêté viziriel du 16 décembre 1918) ;

-la vente des marchandises abandonnées en douane (décret du 30 mai 1922).

La répression de la fraude en matière de douane avait fait l’objet d’un dahir du 11 octobre 1925. Cette nouvelle loi admettait pour établir les délits et contraventions, tous les modes de preuve légaux. Elles permettaient, en outre, aux tribunaux, lorsque la marchandise n’avait pu être saisie, de remplacer la confiscation par la condamnation à une somme égale à la valeur de la marchandise d’après le cours du marché intérieur pratiqué à l’époque de la fraude. La durée de la prescription pénale était fixée à trois ans.
 


 

 


 

 
9Dahir du 16 décembre 1918 – B.O 322 du 23 décembre 1918 P. 1134: Cf. Annexe ……